Commode Régence

Etude

Définition : meuble de rangement constitué d’un corps fermé portant au sol comportant un nombre relativement limité de tiroirs en général 2 à 5 lesquels sont les plus souvent de largeur. (Thésaurus)

« Son nom même révèle sa nouveauté. Dénommer « commode » un meuble d’usage, c’est exprimer un soulagement. Il fallut qu’un homme subtil inventât le meuble à tiroirs indépendants  pour que chacun s’écrit « Voilà qui est commode ! » Guillaume Jeanneau, Les Commodes, Editions d’Art Charles Moreau.

Histoire

Les premières commodes apparaissent dans les années 1690. Auparavant, le meuble usuel et symbolique était le coffre (on vivait encore et se déplaçait à cheval). A la fin du règne de Louis XIV, on se fixe. Le meuble usuel devient alors la commode (fin XVII). Il semblerait que les deux commodes de Boulle (marqueterie de cuivre et d’écaille) qui proviennent de la chambre de Louis XIV à Versailles comptent parmi les premières commodes exécutées en France (1690-1710). Il existe cependant déjà des commodes qui apparaissent préalablement :
  • 1709 : Inventaire des biens de Philippe POITOU, maître ébéniste « commode en marqueterie contre-partie … ».
  • 1697 : M. de METZ, garde meuble de la Couronne inscrivait à l’inventaire général ….. « six tables en bureau » présentant une disposition singulière : elles sont « garnies de trois tiroirs sur toute la longueur ». Elles apparaissent ensuite sous le nom de commode à l’inventaire de 1729

Style

  • Les frisages sont simples, en fils inversés.
  • Les liaisons des frises et filets ne sont pas faites en coupe à 45°.
  • Les motifs sont en chevron (vers le bas) sur les côtés et en fougère sur les tiroirs.
  • Un filet vient séparer l’avant et les côtés de la commode (le seul en fil). Deux autres viennent l’entourer de chaque côté.
  • L’inclinaison des placages / veinages n’est pas réalisée en miroir relativement au centre de la commode.
  • Le placage des traverses est séparé du placage des montants.
  • Le placage est réalisé en fil dans les angles des tiroirs et en dessous dans un objectif de protection.
  • Les champs sont en bois de travers de façon à récupérer toutes les chutes( pour des raisons d’économie).
  • La façade des tiroirs est non affleurante avec la façade de la commode tiroir bas

Conception et assemblage

La commode est un parallélépipède rectangle dont la façade est ouvragée en courbes et contre courbes en plan ; elle se compose de quatre montants et de 4 traverses galbées en façade permettant de recevoir les tiroirs. Les 2 traverses à l’arrière reçoivent un panneau dans le cadre qu’elles forment avec les montants arrières. Les côtés sont composés de planches assemblées pour recevoir le décor.

Assemblage de la partie arrière

L’arrière de la commode est conçu de deux montants et de deux traverses recevant assemblées par tenons et mortaises et recevant un panneau en rainure. Un assemblage se distingue des autres: il s’agit d’un faux tenon visible par le dessous de la partie arrière.

Le panneau est d’une facture différente de celle de l’ensemble de la commode : les éléments qui le composent sont assemblés à rainures et languettes. Une mise au molet a été effectuée sur le pourtour du panneau pour permettre son embrèvement dans les montants et traverses.

Assemblage des fonds de propreté

Les fonds de propreté assurent une séparation des tiroirs. Ils sont constitués de feuillets disposés sur les feuillures réalisées à l’intérieur des traverses en façade et dans les feuillures des traverses arrières, lesquelles se logent dans les entailles des montants arrières. Les feuillets ont été posés dans les feuillures. Cette conception fut employée sous la régence et en début du style Louis XV.Les fonds de propreté reçoivent les tasseaux de guidage des tiroirs ainsi que les calages assurant le réglage et l’inclinaison de la façade des tiroirs.

Louis_XV_by_Maurice-Quentin_de_La_Tour

Proposition de datation

Après l’étude attentive de l’ensemble de la commode et de ses composants nous pouvons à présent proposer une datation. Cette commode à quatre tiroirs, dont le bâti Régence garde encore des stigmates de la raideur des meubles Louis XIV, a une façade dite « en arbalète », c’est-à-dire que celle-ci se cintre légèrement en plan.  Nous sommes encore loin des courbes et volumes cintrés en plan et en élévation des meubles de style Louis XV, mais ce léger mouvement de la façade marque le début de cette recherche.

Les bronzes, soulignant et garantissant la protection des arrêtes fragiles sont d’inspiration rocaille. Ils rehaussent les éclats des bois. Les mains fixes caractéristiques de l’époque régence proposent un décors rocaille typique du style Louis XV.Le marbre ne semble pas être celui d’origine mais il semble ancien, avec une moulure en bec de corbin bien typique de la régence. Cette commode serait donc un meuble d’une période transitoire reprenant les caractéristiques de la période Régence (1715-1723) avec quelques prémices de ce qui fera le style Louis XV (1723-1774).

Ce meuble s’inscrit donc dans le début de la période rocaille aux alentours des années 1730-1735.

Conclusion sur l'assemblage

L’assemblage des éléments du bâti a été entièrement réalisé à la main et nous amène, à l’examen, à remarquer que le solide revêtement de placage scié constituant le décor a sans doute conduit les artisans à s’accommoder de certaines difficultés. Ainsi, la qualité des bois utilisés à la fabrication de la commode est moindre qu’elle ne le sera au XIXème siècle.